"Boissons, paroles, et confidences"

“Il faut à l'amitié la simplicité des gestes autant que la spontanéité des confidences.”

Décidément le sort s’acharnait en ce moment sur ma personne. Déjà avec l’affaire en cours, où les indices se faisaient rares et pourtant le rythme des vols de plus en plus violents ne diminuent pas. Ça mettait toute l’équipe en rogne et on n’hésitait pas à faire des heures supplémentaires pour essayer de résoudre cette enquête qui commençait un peu trop à traîner. Mais on espère qu’un jour ou l’autre ils feront une erreur. En devenant flic, je sais que l’on tomberait parfois sur des os. Mais je n’aimais pas le travail qui n’était pas terminé. Et surtout que je ne comprenais pas leur mode opératoire ni leurs motivations. J’avais une idée assez personnelle de la justice, et de la manière de la mettre en œuvre. Mais ça n’empêchait pas d’être en rogne contre ces voleurs sans scrupules et surtout qui agissait sans raison et non pas pour se défendre d’une quelconque injustice.

Mais, en plus de cette affaire, ma vie privée était encore plus compliquée. C’en était même désespérant. J’avais pratiquement envie de me taper la tête contre les murs. Je ne le ferais pas, bien sûr, mais ça me démangeais fortement. Les disputes avec James étaient de plus en plus fréquentes, et le moindre prétexte était bon pour se gueuler dessus. On ne se balançait encore rien au visage, mais parfois la tentation était grande. Pourtant l’amour était encore là, peut-être un peu plus caché par nos disputes, par la distance que l’on mettait entre nous. Mais on devait traverser cette crise entre nous, la première aussi importante en plus de dix ans de vie commune. Et, franchement, je ne sais pas comment on allait s’en sortir de cette impasse. Mais, en plus de ça, il y a Judson, qui n’est nul autre que mon meilleur ami mais aussi mon coéquipier. Et Judson m’avait embrassé. Le gros merdier, non ? En gros j’avais de quoi réfléchir pour les mois prochains.

Au milieu de tout ça, j’étais littéralement paumé. J’avais besoin non seulement d’échapper un peu à l’ambiance désastreuse de l’appartement conjugal, mais aussi du commissariat et de la présence entêtante de mon meilleur ami. Je fréquentais depuis quelque temps maintenant que je fréquente un bar lorsque j’ai besoin de m’aérer la tête. J’avais sympathisé avec un serveur qui était dans mes âges. Il semblait assez discret, tout à fait le genre de personne que j’apprécie. Il savait déjà que tout n’était pas rose avec James, parce qu’il m’arrivait d’en parler parfois. Mais bon, je n’étais pas du genre à m’épancher encore et encore sur ce que je vivais, même si je ne pouvais pas nier que ça faisait du bien. Je n’étais pas venu depuis un moment, avec cette affaire sur les bras qui prenait tout mon temps. Alors, quand j’entre et entend l’ambiance habituelle, je commence déjà à me détendre. Je vais directement m’installer au bar, à ma place habituelle, jetant un coup d’œil rapide aux alentours. Je souris et hoche la tête à ton encontre, finalement ce soir allait être un soir où je déballerais probablement certaines choses. J’en avais bien besoin.

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“Il faut à l'amitié la simplicité des gestes autant que la spontanéité des confidences.”

Essayer d’éclaircir ses pensées, ce n’est pas aussi facile qu’on le dit. Genre hop d’un claquement de doigt et tout est clair. Un éclair de génie et tout est résolue. Et le père Noël apparaît aussi. Faut arrêter de se moquer du monde quand même. Moi, j’ai plutôt l’impression que c’est le contraire. Hop je croise quelqu’un et ma vie devient infiniment compliquée. Sauf que cette personne c’est Judson, qui n’est autre que mon meilleur ami. Il avait bel et bien mis le merdier dans ma vie et pourtant j’étais bien incapable de lui en vouloir. Et plus je réfléchissais, moins je comprenais dans quels problèmes je m’étais moi-même enfoncé. L’indécision faisait maintenant partie de mon quotidien. Mais il allait bien falloir que je choisisse à un moment donné, mais je ne suis pas encore prêt à ça. Pas prêt à choisir entre deux personnes qui sont si importantes dans ma vie. Je suis bien incapable de choisir et surtout d’en faire souffrir un, du moins pour le moment. Du coup cela me rend extrêmement lunatique et de mauvaise humeur la plupart du temps. Surtout que James comme Judson faisaient partie intégrante de ma vie, et que je ne pouvais pas rayer une personne de ma vie. Je devais simplement faire le point sur tout cela et tenter de ne pas les faire souffrir. Alors une soirée en solitaire, sans un des objets de mes tourments me feraient le plus grand bien. Je suis néanmoins heureux de voir au bar Ciaran. Il m’était toujours de précieux conseil à chaque fois. « Salut ! » Je te souris en m’accoudant au bar tout en m’asseyant sur un des tabourets de libre. « M’en parle pas, on a une affaire sur les bras qui nous prend tout notre temps, ça et les affaires courantes on croule sous la paperasse… » Je soupire, parce qu’en plus de ma vie personnelle merdique, ma vie professionnelle prenait le même tournant si on ne résolvait pas rapidement cette fichue affaire et que l’on ne mettait pas sous les barreaux ces suspects. « Hein ? euh oui comme d’hab. » Je te souris avant de hausser les épaules. « Je ne dors pas beaucoup en ce moment. On peut pas dire que j’ai une vie tranquille en ce moment… Mais ça passera. » Je tripote mon verre, faisant tourner le liquide dorée de ma bière à l’intérieur. « Vu comment c’est brouillon, pour parler poliment, dans ma vie, je ne sais même pas par quoi commencer. » Je soupire, pourtant peut-être que ça éclaircirais certains points.

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Voir d’autres têtes que celle du travail ou même celle de James est aussi très agréable. Changer d’air, pouvoir se confier à des personnes extérieures à toute cette merde que je me traîne actuellement. Et boire un verre dans le bar de Ciaran était probablement la meilleure idée pour s’échapper un peu. Et puis, personne ne te connaissait dans on entourage et tu ne connaissais personne. Ce qui, pour moi, était un atout non négligeable dans les confidences. Il n’y aura pas de jugement, c’est aussi ce que j’apprécie chez toi. D’ailleurs beaucoup t’aurais jugé sur ton passé, mais ce n’est pas mon cas. À vrai dire, le passé de chacun ne regarde que lui, je ne vois pas pourquoi on devrait s’y attarder au point de se faire avis rien que sur des actions passées et qui ne nous ressemblent plus. Malheureusement la société n’est pas prête de changer. « Non, je pense que malheureusement sans une certaine passion on est incapable de faire ce travail correctement. Alors si en plus de ça, c’est le bordel dans ma vie privée, je ne sais pas trop comment souffler sans fuir ma vie quotidienne. Tu sembles décidément bon observateur. « t’aurais fais un bon flic, meilleur que la plupart. » constat rageant quand on voit que la majorité ne voient pas plus loin que le bout de leur nez, moi le premier quand on voit dans quel bourbier je me suis mis. « Ouh, je ne sais pas si y a rien à dire ou le contraire, tellement c’est merdique de ce côté-là. On s’engueule toujours autant voire si ce n’est plus que la dernière fois. Et on s’éloigne un peu plus. » Je passe une main sur mon visage avant d’avaler une grande gorgée de ma boisson, prêt à m’abrutir le cerveau pour quelques heures. « Et sans parler de mon meilleur ami… qui m’a embrassé… » Nouveauté. Je finis par cacher ma tête dans mon bras sur la table en un grognement. Mais tu me laisses le temps de réfléchir de faire le tri et de savoir surtout si je peux en parler ou pas. Je soupire avant de passer une main sur ton visage « je crois que ma vie professionnelle, je peux gérer, on a une affaire qui nous met sur les dents, mais bon, c’est un peu normal en somme. Mais.. je me suis foutu dans la merde avec James et Jud. » je ne sais pas si tu comprends, et vu que j’avais commencé à me confier, j’allais terminé… « Surtout que Jud ne me laisse pas insensible, enfin depuis le baiser quoi.. J’ai été incapable de le repousser… et.. pourtant jamais je n’aurais imaginé ça… J’sais plus quoi faire… » Je finis mon verre avant de te le tendre. « La même s’il-te-plaît. »

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« ça c’est certain, ça les ferait redescendre sur terre pour certains. Et surtout ça les aiderait à faire mieux le travail, et encore s’ils ne sont pas une cause perdue, parce qu’il y en a un sacré nombre quand même. » Mais bon, ce n’est pas vraiment le sujet qui me perturbe en ce moment. Le boulot, à la limite, et même avec cette affaire qui nous prend la tête, était ce qu’il y avait de plus paisible dans ma vie actuellement. Et puis ce métier c’était surtout une très grande partie de ma vie, je ne vois pas ce que je pourrais faire d’autre. C’est un peu comme une seconde peau, parfois quelque peu démangeante. Mais, pouvoir sortir de ce milieu, et de mon cocon personnel en venant ici était très agréable. Surtout que c’était un endroit que personne dans mon entourage proche ne connaissait. Et aujourd'hui, c’était quand même un sacré avantage. Pouvoir souffler et surtout vider ma tête. Tu avais déjà en main certaines informations, donc je n’aurais pas besoin d’en parler encore, ruminer ces choses qui me bouffent déjà. Mais comme si ce n’était pas assez, la situation s’était encore aggravée. Je grogne légèrement en hochant positivement la tête. « je ne te le fais pas dire. » je frotte mon visage, j’ai l’impression de me dégouter de moi-même. On n’avait au moins pas besoin de me faire des reproches, je me le fais assez moi-même. Je te laisse t’éloigner, je ne peux pas t’empêcher de faire ton travail, et je ne l’accepterais même pas. J’attends que tu reviennes. Au moins j’ai le temps de tenter d’ordonner mes pensées, enfin autant que je le peux. Et sans boisson, je ne sais pas si j’aurais assez de courage pour parler de tout ça sans m’effondrer comme un pauvre gars. Moi qui tient tête aux pires cruatés du monde, est bien incapable d’affronter la déchéance de sa propre vie. « on va tenter de faire ça. » je hausse les épaules, avant de soupirer profondément quand tu évoques James. Rien que lui, c’est déjà bien compliqué. « Je ne sais pas si je l’aimes encore. Je sais que j’ai toujours une affection profonde pour lui, et ça sera toujours le cas. Après j’ai l’impression qu’on ne sait plus se parler sans que l’on se dispute. Il s’est passé quelque chose avec lui mais je n’arrive pas à savoir ce qui s’est passé, et je ne pense pas en avoir le droit désormais… » je ne pense pas que ça m’avance à quelque chose ses confidences. Je prends une longue gorgée de ma boisson avant de reprendre la parole. « James a commencé à s’éloigner, comme si.. Je sais pas.. Comme s’il s’était passé quelque chose que je ne saisis pas ou qu’il veut me cacher. » je grogne « je suis désolé c’est loin d’être clair… » Comme ma situation, finalement.

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“Il faut à l'amitié la simplicité des gestes autant que la spontanéité des confidences.”

Généralement je me confiais rarement. J’avais appris à gérer mon stress et mes problèmes, à les garder en moi pour ne pas que ça se répercute sur mon travail. Mais, là c’était totalement le bazar et ça devenait impossible de gérer ça sans en parler à personne. Et puis, peut-être que si j’en parlais à quelqu’un cela m’éclairerait un peu plus. J’avale une gorgée de mon nouveau verre, en prenant mon temps cette fois-ci. Je n’étai pas un adepte des abus, j’en voyais que trop les conséquences dans mon métier. Alors être saoul, ce n’est pas pour moi. Rien à craindre de ce côté-là. Mais, quand on aborde la question de James, je sens ma volonté s’effriter quelque peu. Je secoue la tête doucement. « Effectivement, et je ne sais pas comment l’expliquer. Mais, je ne sais plus où j’en suis avec lui. C’est comme si tout était flou entre nous. Un jour je suis sûr que je n’ai plus de sentiment, et le lendemain c’est totalement le bordel de nouveau dans ma tête. Décidément le cœur n’en fait qu’à sa tête… » Je soupire, « si je n’ai plus de sentiment pourquoi c’était si dur de me séparer de James ? J’ai à chaque fois l’impression que l’on me roule sur le corps. Je replonge dans mes réflexions alors que tu me demandes de songer au fait de savoir ce que me cache James. « J’en sais rien, mais j’ai besoin de savoir. Et peut-être que je devrais être franc avec James. Je ne sais pas pourquoi on est arrivé à un tel point de notre relation, on ne se cachait rien. » je croise les bras alors que l’impression d’être glacé est de plus en plus présente. Essayant de me réchauffer comme je peux, j’avale une nouvelle gorgée de mon verre. « On était tellement fusionnel que cette distance soudaine me laisse plutôt perplexe. Ce que je veux dire c’est qu’avant tout ça, ces questions ne se posaient même pas. C’est assez étrange comme situation. » je hausse les épaules avant de faire tourner le liquide dans mon verre. « Mais James n’est définitivement pas le pire de nous deux, je crois que je bats tout les records. » Je soupire, et ça je ne peux qu’assumer mes propres erreurs. « Désolé je dois t’embêter avec mes histoires. »