Il a fini par céder. Après avoir passé des nuits blanches durant plus de quatre jours et s’être torturé l’esprit, Ciaran est forcé d’admettre l’évidence : il a développé des sentiments pour cette adolescente aux formes juvéniles. Le fait d’avoir mêlé ses formes aux siennes, d’avoir partagé une intimité avec elle, semble provoquer de douces réactions au cœur de sa poitrine. Cette affection s’est imposée face à son absence et au manque que cela a provoqué dans sa poitrine. En conséquence, il désire la revoir, entrevoir ses traits pour profiter de nouveau de la joie naturelle et rafraichissante de la demoiselle. Après quelques échanges de SMS assez tendus, elle le pousse à se confesser et accepte de le rencontrer. Il l’attend donc patiemment dans sa voiture, simplement vêtu d’une chemise blanche et d’un jean. Il est passé rapidement à l’appartement pour se changer et prendre une douche pour être plus frais, puisque la fatigue se fait plus réelle sur ses traits. Assis au sein de sa voiture, il attend la sortie de l’adolescente en ressentant un léger trouble l’envahir jusqu’à qu’il la voit apparaitre dans son champ de vision. Elle le remarque, vient le rejoindre dans la voiture. « Salut, crevette ! » Il use de son surnom habituel. Son sourire bienveillant et tendre orne ses lèvres. Il est heureux de la voir et cela se lit dans l’éclat de son regard.

L'adolescente a eu de la difficulté à accepter ce rendez-vous précipité, inattendu, trop effrayée de recevoir des paroles glaçantes qui auraient brisé ses illusions et ses espoirs à tout jamais. Elle imaginait que Ciaran désirait lui retirer tous les rêves possibles de son crâne, qu'il avait pris une décision quant à leur relation particulière, et qu'il se devait de lui annoncer face à face. Alors elle a tenté d'esquiver cette rencontre qui la paralysait, mais en vain quand on connaît l'insistance et le pouvoir de persuasion du blond. C'est sans compter aussi la curiosité maladive de Shannen, qui s'est empressée d'exploser ses doutes et qui a reçu un bout de la vérité : Ciaran éprouvait un sentiment fort à son égard, il serait même amoureux d'elle. Alors elle lui a proposé de venir la chercher au lycée pour se rendre ensemble au cinéma, afin de savourer un premier rendez-vous et des retrouvailles agréables. Maintenant qu'elle connaît la profondeur de son affection, elle a envie de l'embrasser partout, caresser ses cheveux, sa nuque. Les heures d'éducation paraissent maintenant longues, elle succombe au désir de le voir tout de suite dans la minute, sans ne plus attendre. Mais il faut être patiente, entendre les récits stériles et insipides de son professeur de mathématiques. Quand la sonnerie retentit à ses oreilles, Shannen se précipite ainsi à ranger ses affaires pour se précipiter à l'extérieur, retrouvant le froid glacial habituel. Même pas le temps de mettre comme il faut son écharpe qu'elle s'introduit déjà dans la voiture du monsieur qui perturbe son cœur. « Salut le vioc ! » Elle lui rétorque en prenant place à ses côtés, lui rendant ces mêmes sourire et regard lumineux. « Tu as quelque chose à me dire, il paraît ? » Elle rit un instant, avant de venir déposer un baiser contre sa joue, frôlant volontairement l’extrémité de sa lèvre. Elle sait qu'ils devaient en parler au cinéma, mais maintenant face à lui, elle a bien envie d'entendre ces jolis mots être prononcés. Ça la rendrait heureuse, même si elle est dévorée par la joie actuellement.

La joie de retrouver sa complicité avec l’adolescente est réelle. Il a la sensation de redevenir un adolescent tant sa fraicheur est communicative. Il la salut en usant de son surnom habituel et elle ne manque pas de le chercher avec un surnom, qui met en évidence l’écart de génération qu’il y a entre eux. Pourtant, cela l’amuse et rend son sourire plus franc. « Tu commences mal, crevette ! » Il déclare dans un faux ton autoritaire, mais le regard plein de malice. Elle dépose un baiser au coin de sa lèvre, active l’envie qui le ronge de venir s’emparer de ces fines commissures. Seulement, il n’en fait rien, savoure ce léger frôlement en sachant qu’il finira par y goûter de nouveau. Sa remarque lui arrache un petit rire. « Tu ne perds pas le nord, je vois. » Il déclare en lui lançant un coup d’œil avant de s’engager dans la circulation. « Vu que tu as eu un avant-goût, il faudra patienter un petit peu, crevette. » Il la provoque avec ce sourire taquin qui lui est propre. Il ne veut pas l’exprimer de façon banale, car ce genre d’aveu se doit d’être fait dans les bons moments. D’autant plus qu’il est de nature introverti et n’est pas du genre à être expansif dans l’expression de ses sentiments. « Tu as l’air plus radieuse qu’au début de nos échanges. » Il ajoute avec douceur. « Je préfère te voir comme ça. » Il admet simplement. « Le bonheur te rend très belle. » Il termine en venant doucement caresser la menotte disponible de l’adolescente. Un geste furtif, mais empli de signification qu’elle devrait comprendre. Il compte bien devenir son petit ami.actuellement.

Shannen retrouve son homme au sein de la voiture, prête à savourer un moment agréable à ses côtés. A peine rentrée qu'ils se taquinent déjà naturellement, usant de surnoms pleins d'humour qui mettent en évidence leur différence d'âge considérable. La blonde ne s'en formalise pas, continue de sourire et d'être comblée de joie. « Tu l'as cherché, le vioc ! » Elle rétorque toujours avec autant d'audace et d'arrogance, sachant parfaitement qu'il adore quand elle réplique. Elle embrasse ses joues, frôlant discrètement ses lèvres au passage. Elle ne peut pas mentir : elle n'a qu'une hâte, les dévorer. « Ma patience a des limites Monsieur O'Malley ! » Elle s'écrit avec un ton faussement bougon, autoritaire, se trahissant rapidement par un joli sourire. Elle rayonne de bonheur à ses côtés, elle est contente de le retrouver, d'être auprès de lui, mais surtout de le savoir amoureux d'elle. C'est ce qui lui a donné le sourire toute la journée, en plus d'un optimisme renforcé dans les cours redondants et insipides. Elle cesse de rouspéter et se laisse transporter jusqu'au cinéma, Ciaran tenant le volant d'une seule main, l'autre se frayant un passage jusqu'à ses doigts accessibles. Il presse sa main, la caresse avec douceur, ce qui lui apporte immanquablement de la gaieté au creux du cœur. Elle se renforce lorsqu'il complimente sa beauté, jugeant que le bonheur la rend très belle et qu'elle semble plus radieuse qu'au début de leurs échanges sms. Elle sourit en guise de réponse. Le genre de sourire craquant et lumineux qui témoigne d'une joie profonde et sincère. « C'est parce que j'avais la trouille, j'ai cru que tu allais me sortir un truc de vieux qui n'assume pas. Alors forcément, je suis heureuse. » Elle commente avec franchise, lâchant sa main lorsqu'il parvient à un feu et qu'il doit rétrograder. Quelques minutes s'écoulent, avant que Ciaran ne gare sa voiture devant le cinéma. Ils marchent, l'air de rien, commandent leur place, puis atterrissent dans une salle presque vide, seulement occupée par deux trois personnes étalées vers l'avant. Elle s'installe au fond, suivie de près par Ciaran qui s'installe à sa gauche. Même si les lumières ne sont pas encore éteintes, elle tente une approche, crée le contact en frôlant le dos de sa main de ses doigts. « Alors, tu vas finir par le dire ? J'ai envie de l'entendre. » Elle sourit, les yeux étincelants scrutant les siens. Elle est véritablement amoureuse de lui et n'attend que les mots doux qu'elle a espérés ces derniers jours.

« Comme la mienne. » Il la taquine avec la même arrogance qu’elle fait preuve. Il ne se laisse pas avoir par ses airs revêches et autoritaires. Tout comme elle, la joie inonde ses pupilles qui brillent de cet éclat qu’il trouve délicieux. Son bonheur est agréable à regarder et il se sent satisfait d’en être la cause. Il faut dire que son attachement est sincère et profond, bien qu’il ne soit pas du genre à le crier sur tous les toits. Il ne se sent pas apte à lui avouer la teneur de son affection avec la même aisance qu’elle semble le faire. Ciaran fait partie de ses hommes réservés, qui utilisent leurs gestes et actions pour montrer les sentiments qu’ils ont pour l’élu de leur cœur. Pourtant, il sait la demoiselle en attente de ces mots et il compte lui donner cette satisfaction, mais lorsqu’il se sentira dans de bonnes conditions pour le faire. Ce qui n’est pas le cas présentement, au sein de sa voiture. La demoiselle semble le comprendre, n’insiste pas trop et ils s’envolent rapidement vers le cinéma. Il est satisfait de la savoir plus détendue. Elle admet qu’elle a eu peur qu’il ne la rejette de nouveau. Ce qu’il aurait pu faire si sa raison avait gagné sur les caprices de son organe vital. Il se contente de sourire et se concentre sur la route. Ils retrouvent assez rapidement Leurs places achetées, ce qui correspond à une coquette somme, ils se dirigent vers la salle où sera diffusé le film. Ils prennent gentiment place au fond, loin des regards indiscrets pour avoir une certaine intimité. Elle créée le contact, glisse sa main dans son dos. Elle réclame ses mots qu’elle a envie d’entendre, mais cela le déroute. Sans doute par fierté, mais surtout par pudeur, ils restent coincés au creux de ses lèvres. En conséquence, il se contente juste de masquer sa nervosité par un petit rire. « Tu as vraiment envie de l’entendre, à ce que je vois. » Il murmure dans un sourire fin. « Mais tu ne préfères pas que je le dise dans un moment où ça un véritable sens ? » Cela lui semble étrange de le murmurer là, mais il sent qu’elle en ressent vraiment le besoin lorsqu’il sent une pointe de frustration ternir l’éclat océan du regard de l’adolescente. Il se penche pour l’embrasser tendrement après avoir regardé qu’ils étaient encore seuls dans la salle. Sa bouche retrouve doucement la sienne dans une douce étreinte. Sa menotte caresse sa mâchoire du bout des doigts. « Je t’aime. » Il murmure simplement avant de s’éloigner d’elle pour reprendre une position conventionnelle. Il est troublé de l’avoir avoué, son cœur bat dans sa poitrine. Il se sent comme un adolescent malgré son âge et cela provoque son rire de nouveau. Cette demoiselle a vraiment un curieux pouvoir sur lui qui le chamboule profondément. « Satisfaite ? » Il questionne en l’observant du coin de l’œil alors qu’un sourire fin orne ses lèvres. Il sait parfaitement qu’il a fait mouche et savoure la lueur éclate des prunelles de l’adolescente. Il la trouve incroyablement belle et désirable, tout en sachant qu’il se doit de rester sage, car il ne doit prendre aucun risque. C’est aussi la dure réalité qu’ils vont devoir gérer. Ce qui l’angoisse quelque peu…

Les deux êtres liés par un secret lourd à porter, et un lien profond que la société ne doit pas apprendre, ne tardent pas à atteindre le cinéma après un échange plein de taquineries et d'arrogance. Chaque petite pique est bonne à placer dans leur conversation, et chacun s'y adonne avec un plaisir immense pour participer à cette succession de répliques espiègles. Ils achètent les billets - ou plutôt Ciaran qui vide ses économies pour offrir un moment à sa dulcinée - puis s'asseyent au fond de la salle, afin d'échapper aux possibles regards curieux. Libre d'exercer des gestes affectueux puisque la clientèle s'est attardée en avant, Shannen recouvre sa grande main de la sienne pour frôler sa peau et créer un contact plutôt léger et imperceptible. Elle s'impatiente rapidement, avec amusement, pour le pousser à prononcer les quelques mots qu'elle espère vivement depuis qu'ils sont ensemble. Ils ne sortent pas encore, mais il pousse un rire enthousiaste, et des phrases qui permettent de ralentir un peu le temps. Un sourire accroché à ses lèvres, Shannen n'a pas l'intention de lâcher l'affaire. « Tu m'as mis l'eau à la bouche par sms il faut dire ! » Elle se défend pour trouver une raison à son impatience si vivace. Elle ne tient plus en place rien qu'à l'idée d'écouter cette voix douce lui susurrer des mots tendres qui feront vibrer son bas-ventre. « Tu peux me le dire quand ça te chante, pas besoin d'une occasion particulière pour le préciser. Mais je veux l'entendre ce soir ! » Elle refuse d'attendre la fin du film pour qu'il prononce des foutues syllabes naturelles. Ses prunelles se teintent d'une légère déception, car la gamine perçoit un malaise chez lui. Et il semblerait qu'il le comprenne, puisqu'il ne tarde pas à l'embrasser et caresser sa mâchoire de son pouce, malgré la présence d'individus. Il glisse même un je t'aime entre ses lèvres qui rend le rythme de son cœur très endiablé. Elle sourit tout contre sa bouche, heureuse de l'entendre assumer ses sentiments aussi efficacement. Enfin. « Moi aussi ! » Elle déclare même s'il se doute déjà que la réciprocité est exacte, elle lui a spécifié dernièrement. Ciaran reprend sa place, se cale contre son siège en lui demandant si elle est satisfaite. « Pas entièrement ! » Percevoir ses sentiments, sentir son cœur battre dans sa poitrine, lui donne des envies diverses et variées qu'elle aimerait concrétiser. Et les traits tirés de son amant, certainement troublé de prononcer ces mots à valeur sentimentaliste, ne se laissent pas dissimuler ni par son fin rire ni par les lumières qui s'éteignent, annonçant le début du film. Touchée, bouleversée et vivement désireuse de sentir sa proximité sans qu'un accoudoir ne les sépare, Shannen se lève pour entreprendre un pas vers lui et s'asseoir sur ses cuisses. Elle se positionne en travers, s'accroche à son cou et caresse ses cheveux, tandis que ses lèvres parcourent sa nuque, sa mâchoire avant d'atteindre ses lèvres. « Ça faisait longtemps que tu ne l'avais pas dit à quelqu'un hein ? » Elle sourit pour lui montrer qu'elle a saisi, mais surtout parce qu'elle est comblée de bonheur à cet instant, plongée dans l'obscurité, aux bras de son amant exceptionnel.  

Il sait la demoiselle en attente d’une déclaration. Il le perçoit dans la lueur de son regard, dans la manière de la réclamer. Cela provoque sa nervosité, car Ciaran demeure un être pudique dans l’expression de ses sentiments. Il n’est pas du genre à faire de longues déclarations, à complimenter sa belle par des tirades sans fin. Il est plus subtil dans ce domaine-là. Il préfère agir, caresser l’élue de son cœur avec sensualité, douceur, lui composer des chansons pour qu’elle se reconnaisse dans le contenu de ses paroles. Tout est subtilité quand cela concerne le domaine de l’intime, d’autant plus désormais, qu’il s’interdit toute forme de passion similaire à celle éprouvée pour Hailey, son premier amour, le seul avant que cette jeune demoiselle n’envahisse son cœur et le trouble plus que de raison. Alors, par affection pour la demoiselle, afin de ne pas effacer cette lueur enthousiaste de ses prunelles, il abdique, s’applique à la divulgation de ses sentiments par un aveu, qui lui retournera forcément le ventre. Ce qui semble renforcer son état d’euphorie qui s’exprimer par son sourire éclatant contre ses lèvres. Cela en vaut la chandelle, mais sa pudeur le conduit à imposer de nouveau une distance entre eux deux. Il savoure du coin de l’œil, l’effet que ces paroles ont provoqué au sein de la poitrine de la demoiselle, mais celle-ci ne semble pas être entièrement satisfaite. Cela provoque son rire fin et délicat, qui se trouve masquer par la pénombre et le son du film qui commence à être diffusé. Il est prêt à se plonger dedans, mais la demoiselle semble disposée à l’en empêcher puisqu’elle décide de prendre place sur ses cuisses. Surpris, il la laisse faire, se sent incapable de la repousser bien que son regard s’oriente vers les spectateurs dans la salle pour s’assurer qu’ils ne peuvent être vus. Sa proximité est plaisante, provoque une douce satisfaction au creux de ses reins, mais il ne peut s’empêcher d’être nerveux, d’autant plus qu’elle dépose des baisers contre sa nuque, cherche un peu plus ses confidences. Une part de lui aimerait se laisser porter par la complicité qu’elle essaye d’instaurer entre eux de nouveau, mais l’angoisse surpasse cette idée. « Oui, mais regagne ton fauteuil, s’il te plait. On pourra s’embrasser et se câliner de retour à l’appartement. » Son ton est faible, mais autoritaire. Il semble même froid en apparence, car l’inquiétude déforme ses traits. Il a peur d’être surpris, que des personnes puissent mal interprétés leur geste et leur créer des problèmes. Une part de lui exècre cette réalité, mais il a conscience que s’il désire avoir une relation avec l’adolescente, ce sera malheureusement un défi à relever. Ils ne doivent pas s’afficher en public. « S’il te plait, Shannen. On pourrait nous voir. » Son regard ferme retrouve celui de l’adolescente. Il a conscience que cela va l’irriter, détruire une part du bonheur qui l’habite, mais il ne désire pas la priver d’un moment en sa compagnie, parmi la foule des gens. Il peut aisément se contenter de caresser le creux de sa main avec douceur ou frôler sa cuisse dans la pénombre, mais c’est les seules attentions qu’il peut lui offrir à cet instant et il aimerait qu’elle le comprenne.  

Le bonheur consume la jeune adolescente, qui se laisse porter par ses sentiments pour savourer davantage cet instant presque romantique. Tous deux installés confortablement dans un siège de cinéma, prêts à regarder un film indépendant peu célèbre, ils se lancent des regards amoureux et des mots doux. Shannen entend même une révélation sentimentale glisser de sa bouche dans un élan affectueux. Il lui affirme qu'il l'aime, en la fixant de ses yeux pénétrants, et en employant ce ton caractéristique du blond : percutant et empli de conviction. Ce n'est pas une confidence ordinaire, Shannen n'a par ailleurs jamais reçu de tels mots, à part de sa mère. Alors chamboulée, elle se contente de sourire avant de rayonner de nouveau. Surtout lorsque son blond s'engouffre dans un trouble évident, certainement formé par les angoisses qui l'assaillent. Shannen ne se démonte pas et n'a pas l'intention de le laisser regarder le film dans ces conditions, alors que son regard s'est assombri. Ils sont plongés dans l'obscurité, pourtant elle ne décèle plus ce brin de luminance dans ses prunelles. Au contraire, elles semblent éteintes, succombant à la morosité et culpabilité qu'il contient. Son regard est seulement le miroir de tous les sentiments qui s'agitent en lui à cet instant. Alors elle s'approche de lui, s'assoit même sur ses cuisses pour former un cocon apaisant autour de lui. Accrochée à son cou, elle n'a plus envie de s'écarter, et agrémente même leur étreinte par quelques baisers le long de son cou. Elle tient réellement à atténuer l'affolement de son cœur, à apaiser son âme comme il l'entreprend chaque fois que son cœur est bousculé ou brisé par la peine qui l'anime. Et s'il semblait apprécier son initiative, il finit par la décoller de lui en l'invitant très clairement à regagner son propre siège. Brusquée, étonnée, Shannen l'observe attentivement, tentant de démanteler son esprit tiraillé. Elle a envie de lui hurler "tu es sérieux là ?" mais cela pourrait éveiller les esprits curieux des clients en avant de la salle. Son impulsion aurait pu éclater comme à son habitude, mais elle est tellement sous le choc qu'aucun mot n'explose durant un instant. Sa froideur la brise, l'exaspère. Mais sagement, elle retourne à sa place pour éviter le scandale. De toute façon elle n'a même pas envie de sentir sa chaleur, ni même la douceur de sa peau, elle a trop été glacée par la froideur de sa voix, de son geste de recul. Son air boudeur est remarquable sous la luminosité des images diffusées. « Tu as vraiment peur pour rien. On est au fond, dans le noir. Y'a personne autour de nous, personne qui va rentrer. » Elle murmure dans une voix enragée, faisant toutefois attention à ne pas monter le ton au-dessus d'un susurrement. « Une soirée toi et moi, pour se retrouver... tu m'as bien eue. » Elle soupire de dégoût, de colère, de souffrance ; un peu tout à la fois, dans un mélange brusque qui l'étouffe. Elle est bouffée par la rage et se déconcentre complètement du film. Elle n'a plus le goût d'en profiter. Il a tout gâché avec son comportement à la con. « Ton je t'aime, tu peux te le mettre où je pense Ciaran. » C'est peut-être une adolescente mais elle n'a aucune envie de se contenter de quelques mots doux prononcés sans que les actions ne suivent. Alors elle commence à enfiler son manteau, se relevant pour commencer à fuir. « Tu fais chier. Je rentre. J'ai même pas envie de regarder ce putain de film. C'était pas le but. » Elle avait seulement espéré se blottir contre lui, s'accaparer ses lèvres. Juste pour un instant de plénitude, juste pour rêver le temps de cette œuvre cinématographique et chasser toutes ses frustrations quotidiennes. Juste pour l'aimer de tout son cœur. 

La nervosité qui le gagne est conséquente. Elle dépasse l’adrénaline provoquée par cette chaleureuse et délicieuse étreinte que lui adresse Shannen. Il ne peut rien faire contre ce sentiment de malaise s’immiscer dans ses veines, au point de le rendre moins enclin à profiter de la douceur et complicité qui le lie à l’adolescente. Malgré la pénombre, le peu de personnes présentes, il craint qu’une personne ne se retourne ou pénètre dans la salle avec du regard et intercepte leur étreinte. Il craint le regard qu’on peut lui porter, notamment que l’écart entre leurs deux âges est flagrant. Il a déjà perçu la brève suspicion du guichetier lorsqu’il a pris les places. Il a conscience qu’il a l’âge d’être son père, mais cela n’alterne en rien l’affection et le désir qu’il lui porte et il est le premier frustré à ne pas pouvoir s’afficher. Seulement, il se doit d’être prudent, car il n’est pas à l’abri d’une suspicion de pédophilie. Et cela le tuerait qu’on l’accuse de cela, sans parler que cela pourrait détruire à tout jamais sa relation fusionnelle bien que récente avec sa fille : Summer. Cela le tuerait de perdre sa garde, d’être condamné à se tenir éloigné d’elle. Pourtant, cette crainte l’adolescente ne le perçoit pas. Il le sent dans la raideur de ses traits que l’obscurité ne masque pas totalement. Elle se dégage de ses bras, mais il est évident que ses paroles viennent d’éclater la bulle de bonheur que ses aveux avaient provoqué. Cela le rend que d’autant plus troublé par la situation, alors que l’adolescente crache sa hargne. Il la trouve légèrement injuste dans ses propos, mais s’efforce d’encaisser sans faire de vagues. Ce n’est pas ni le bon moment, ni le bon endroit pour le faire. Et les paroles de l’adolescente se font d’autant plus cinglantes. « Tu es injuste, Shannen. » Il lâche avec un ton ferme, presque autoritaire. « Tu sais très bien que ce n’est pas simple pour moi. » Il ajoute alors qu’elle désire s’envoler du cinéma. « On a toute la soirée devant nous. On peut juste profiter d’un cinéma en se tenant la main avant de filer dans un endroit plus secret où personne ne pourra nous voir. » Il essaye de la retenir en lui attrapant le poignet. « J’ai juste voulu t’offrir un rendez-vous comme tu pourrais en avoir avec un autre garçon, mais je suis désolé, je ne peux pas faire comme si j’étais un garçon de ton âge. Ils représentent tous un danger pour moi. » Il se défend sans hausser la voix. Il ne désire pas que les autres interceptent leur conversation, mais il est évident que cela doit en interpeller certains, qui tournent légèrement la tête vers leur direction en retrait. « Et tu sais bien que si ça tenait qu’à moi, tu pourrais faire ce que tu veux. Mais ça, c’est possible que lorsqu’on est en intimité, pas en public. » Sa respiration est vive, car il ne désire pas la voir quitter les lieux. Indirectement, il espère tempérer sa colère, sans user de mensonges ou autre pour la manipuler. Oui, il a envie de l’embrasser, la sentir sur ses cuisses et savourer le contact de ses doigts sur son corps, mais pour le moment, dans un tel contexte, ils se doivent d’adopter des gestes discrets, car le danger est permanent. Il aimerait juste qu’elle le comprenne.

La soirée qu’elle s’était dessinée au creux de la tête semblait prometteuse et merveilleuse. Son blond lui avait précisé qu’ils savoureraient un moment ensemble au fond de la salle de cinéma, pour lier leurs lèvres et apprécier la caresse subtile et délicate contre leurs cœurs endiablés. La réalité dans laquelle il la plonge est toutefois plus désastreuse que prévue, même source de frustration tant il y a un décalage avec ce que Shannen imaginait. Au lieu de l’accueillir au creux de ses bras et de posséder ses lèvres avec passion, l’aîné préfère la repousser et l’inviter à regagner son siège. Il use d’un ton peu assuré, mais qui précise l’envie de se détacher d’elle pour ne pas éveiller les soupçons. Il pue l’effroi, il témoigne simplement du risque évident qu’ils prennent à rester complices. Trouvant son geste injustifié et certainement trop excessif, étant donné l’absence de gens autour d’eux et l’obscurité qui dérobe leurs traits et leur amour indécent, Shannen explose. Elle ne contient pas la rage qui la domine en cet instant, et les remarques acerbes franchissent ses lèvres sans retenue. « Peut-être, mais au moins mes paroles sont sincères. » Elle rétorque avec dédain pour lui faire comprendre subtilement qu’il lui a menti. Certainement qu’elle est injuste, capricieuse aussi ; peut-être qu’elle devrait se contenter de ce qu’il lui offre, mais elle est tout bonnement incapable de garder son calme face à cette désillusion. « Oh allons, je te demandais juste un petit effort de rien du tout ! C’pas comme si je t’avais demandé de m’embrasser en pleine rue bondée et ensoleillée ! Parce que je le ferai jamais, d’ailleurs ! » Elle ne veut pas d’un cinéma entre amis, elle souhaite le savourer en compagnie de son homme, et entreprendre toutes ces petites choses de couple pour le retrouver tout entier. Elle ne croit pas être bourrée d’exigences quand on constate les lieux vides et le noir qui pèse sur la salle. « Les garçons de mon âge m’auraient déjà sauté dessus et c’est pas ce que je veux non plus ! Pourquoi tu me sors ça d’ailleurs ?! Je veux pas d’un garçon de mon âge ! Et je veux pas non plus d’un coincé effrayé qui a peur d’être vu dans le noir ! » Elle murmure discrètement mais la rage coincée dans ses paroles parvient à attiser la curiosité de certains. « Tu as décide d’être têtu, eh bien moi aussi, figure-toi. » Elle crache en se détachant de sa poigne ferme contre son poignet. « Je n’ai pas envie de ce que tu me proposes. Ça me tente pas de regarder un film. Je suis pas venue pour le film Ciaran. » Son ton s’adoucit légèrement, pour lui faire comprendre qu’elle s’impatientait de leurs baisers langoureux, de leurs caresses exquises, de leur moment tendre en amoureux. Il est buté sur ses idées comme elle est campée sur ses positions. « Je veux rentrer. » Elle fuit obstinément son contact, avant de s’envoler par les marches pour retrouver le froid glacial de l’extérieur – ce qui finit à durcir son cœur. Elle ne daigne pas l’attendre, elle commence plutôt à marcher en direction de son appartement, même s’il se trouve à une trentaine de minutes.