Aiden & Ellie

  Saturday Night (fever)

« C’EST PAS GENTIIIIIIIL ! » Je crie, comme si les filles pouvaient m’entendre alors qu’elles ne sont même pas là. Je suis actuellement debout sous la douche, tout nu évidemment et il y a seulement de l’eau froide qui me coule dessus. Elles ont dû prendre un bain chacune avant de sortir ce matin, je ne vois que ça comme explication parce qu’il ne reste plus aucune goutte d’eau chaude.  Je reste moins d’une minute sous la douche avant d’enrouler ma serviette autour de moi pour en sortir aussitôt. Il fait déjà froid, alors on va éviter de choper une grippe ou quelque chose du genre. Je jette un coup d’œil à l’horloge de notre hall d’entrée et … Putain, midi. Du coup, je ne sais pas si je dois petit-déjeuner ou carrément déjeuner. Dans la cuisine, je découvre des toasts grillés et un petit mot signés Charlie. Oh, c’est gentil. Je n’aurais jamais cru dire ça un jour, mais finalement, vivre avec des filles n’est pas si mal. Bien sûr, il y a des petites contraintes et elles ont chacune leur caractère mais au final, on s’amuse bien. Il y a tout d’abord Izzy la folle dingue et avec laquelle le feeling passe naturellement. En réalité, le feeling passe avec chacune d’entre elles, ce n’est juste pas le même. Donc on disait : Izzy. Parfois, je la soupçonne d’être atteintes de maladies psychologiques, elle refuse peut-être juste de nous en parler. Puis, il y a Charlie et Emma, le duo de chocs. Elles se connaissaient bien avant la coloc’ et d’ailleurs, ça se voit qu’elles sont ultra complices. Charlie, it’s my partner in love-crime. Des fois, quand je me pose des questions existentielles et que j’essaye de comprendre pourquoi je suis encore célibataire bien que je sois l’homme idéal et parfait, je pense à l’histoire de Charlie et tout de suite, j’ai mon explication : l’amour, c’est trop compliqué pour moi. C’est trop prise de tête, trop douloureux, trop … beaucoup de choses. Du coup, je m’amuse à rendre Bastian jaloux parce que mine de rien, leur histoire est trop choupie et ne mérite pas d’être gâchée. Elle de son côté, elle essaye aussi de m’aider mais bon, ça fait déjà quelques temps que je n’ai plus envie d’avoir une copine. Juste des flirts par-ci par-là, un dîner, une soirée, un lit partagé. Rien de plus. En ce moment, il y a Maya, le genre de nana trop mignonne qui pourrait m’intéresser mais bon, elle ne semble pas vouloir finir dans mon lit. Tant pis pour elle, elle ne sait pas ce qu’elle rate.

Après avoir fini de manger, grignoter, regarder trois épisodes de Bob l’éponge, manger encore, chanter Coldplay, m’habiller, passer du gel dans mes cheveux et finir le dernier cookie, c’est l’heure d’aller au boulot. Si ma mère était là, elle m’aurait engueulé « mais tu n’as pas fait ton liiiiit ! ». Ouais, mais pas grave maman, ce soir, je redors dedans.

« Tu peux rentrer, si tu veux, je vais me débrouiller. » Et puis … Il y a Ellie. Elle est censée faire la fermeture avec moi ce soir because, je lui ai laissé sa soirée la dernière fois because je suis trop gentil and because, elle avait un rencard. Je me demande avec qui, si ça s’est bien passé et s’il est plus beau goss que moi. Hm. J’aimerais bien lui demander, mais après elle va croire que ça m’intéresse alors que clairement OUI, ÇA M’INTÉRESSE. Je ne comprends d’ailleurs pas pourquoi. Je veux dire, je ne suis pas le genre de gars à raconter ma vie à mes serveuses (mes colocs ne se gênent pas pour le faire à ma place) ou à me pencher sur la leur sauf que … Bah j’sais pas. Mais Ellie, elle a l’air trop innocente pour ce genre de trucs et puis, elle est gentille, drôle et j’sais pas. Ouais, j’sais pas. Je me suis posé pleins de questions sur ce type, savoir si c’est un vrai gentleman et surtout… Oh et puis, on s’en fiche. Je m’en fiche. « J’ai faaaaaaaaim ! »  Je finis par lâcher, en l’aidant à ramasser les verres. « Tu crois qu’ils livrent encore à cette heure-ci ? » Nourriture. Nourriture. Nourriture. Le côté obscur m’appelle. Et puis la bouffe, c’est le seul truc qui ne m’a jamais déçu. Je suis fatigué, je suis fatigué, je suis fatigué. Je pourrais le répéter mille fois tant je suis fatigué. Je savais bien que j’aurais dû me coucher plus tôt au lieu de lire le dernier scan de One Piece mais osef, pas de regrets on a dit. Je ne tiens presque plus sur mes jambes, c’est pour cette raison que j’ai autorisé la jeune femme à y aller il y a quelques minutes, sauf qu’elle semble vouloir rester. Tant mieux. Elle dégage toujours des ondes positives.  « T’as envie de quoi ? Pizza ? Sushis ? Burgers ? Les trois ? » Hééé, j’aurais dû ajouter ‘moi’ parmi les suggestions, mais je suis trop fatigué pour ce genre de blague. J’attrape mon téléphone, compose le numéro de la pizzeria la plus proche et en commande cinq. Quoi ? J’ai faim et on est deux. Puis j’en ai pris des sucrés et des salés. Ils font des pizzas nutella/bananes trop bonnes, je frêle l’orgasme buccale à chaque fois que j’en mange. « Je n’ai plus assez d’énergie, j’ai besoin de manger, de dormir 48h et d’un bon massage. » Je tourne doucement ma tête vers elle, avec un sourire. C’est vrai qu’à part se croiser quotidiennement, on s’est jamais vraiment retrouvé rien que tous les deux.

  Aiden & Ellie

  Saturday Night (fever)

  Rien ne prédestinait la jolie blonde, fille d'un homme d'affaires, ancienne étudiante à Cambridge, titulaire d'un diplôme plutôt prestigieux, à travailler comme serveuse dans un bar d'une petite ville du centre de l'Angleterre. Elle-même se voyait propriétaire d'un joli appartement à Londres, sûrement à Chelsea ou à Notting Hill, maître de conférences, peut-être en train d'écrire un livre, fruit de ses recherches sur un mythe nordique peu connu. Et en ayant une imagination encore plus développée, elle aurait même pu se voir fiancée à un ancien étudiant d'Oxford. Sa vie actuelle était bien différente, mais en y réfléchissant bien, elle était bien plus palpitante et lui plaisait tout autant, voire même plus. Certes son appartement n'était pas très grand, il était un peu vieillot avec ses fenêtres qui laissaient passer le froid en hiver, et la vue sur l'immeuble d'en face aurait pu être améliorée. Mais elle aimait quand même rentrer chez elle, s'enrouler dans un grand plaid quand le sommeil tardait à venir après une soirée bien chargée et profiter de sa petite terrasse ensoleillée en fin de journée. Elle était encore célibataire, mais savait bien que tout vient à point qui sait attendre. Son homme idéal, l'homme parfait, l'attendait quelque part et attendait juste qu'elle le trouve. Son job n'était pas des plus gratifiants, la paie n'était pas terrible, mais après des semaines, des mois, à être une serveuse médiocre, qui oubliait la moitié des commandes des clients, quand elle n'inversait pas leurs cocktails, et dont le nombre de verres brisés augmentait chaque jour, ses progrès étaient enfin remarqués par les habitués. Elle se sentait bien dans sa vie actuelle.

Même si comme tout le monde, elle essayait régulièrement d'améliorer son quotidien. En ce moment, elle était dans une phase où elle recommençait à sortir, pour rencontrer quelqu'un de vraiment fait pour elle. Sa dernière relation avait été un vrai fiasco. L'homme s'était révélé être un menteur de la pire espèce : d'un côté, il lui assurait respecter tout à fait le fait qu'elle ne souhaitait pas faire l'amour avec lui tout de suite, car elle avait besoin de temps pour faire confiance et être à l'aise avec quelqu'un, mais dans son dos, pardonnez-moi l'expression un peu crue, il sautait sur tout ce qui bougeait. Lorsqu'elle l'avait appris, Ellie était entrée dans une rage folle, mettant toutes ses forces dans la gifle qu'elle lui lança le soir où la vérité éclata. Son rendez-vous de l'autre soir, Nathan, était une connaissance d'une cliente avec qui elle avait sympathisé. Elle avait eu de très mauvais souvenirs de rendez-vous arrangés plus jeune, mais pour une fois, elle avait mis ses préjugés de côté et avait dit oui. Elle avait dû demander un changement d'horaires à son patron, qui avait finalement accepté sans trop de difficultés. La soirée s'était plutôt bien passée, ils avaient beaucoup discuté, de tout et de rien. Pas de coup de foudre à l'horizon, mais elle avait accepté de le revoir dans quelques jours.

Ce soir, elle faisait la fermeture du bar, ce qu’elle avait proposé à Aiden en échange de sa soirée. Il était une heure du matin, et la salle était vide, complètement vide, chose très rare pour un vendredi soir. Ça devait être un soir de match s’était dit la jeune femme. Ellie était accoudée au bar, tentant avec plus ou moins de succès d’étouffer un bâillement. Elle n’avait jamais été une couche-tard et avait encore parfois bien du mal à être en pleine forme jusqu’à tard le soir. Heureusement qu’au fil des heures, les habitués étaient de moins en moins exigeants. Aiden dut se rendre compte de sa fatigue. « Tu peux rentrer, si tu veux, je vais me débrouiller. » Accepter était tentant, son lit lui semblait tellement attirant là tout de suite. Mais la jeune femme était aussi butée et bornée, elle avait eu une soirée de libre, elle allait donc rester jusqu’au bout comme prévu. « Non non, je reste. Imagine qu’un car de touristes arrive, comment tu ferais tout seul ? » Pour se réveiller un peu, elle quitta sa position un peu trop avachie et entreprit de ranger les verres qui séchaient depuis plus d’une heure sur l’égouttoir. Le jeune homme fit le tour du bar pour venir l’aider. Aide appréciée, elle avait horreur de devoir monter sur l’escabeau pour ranger ceux qui attendaient en hauteur d’être remplis à nouveau. « J’ai faaaaaaaaim ! » Effectivement, elle entendit en même temps son ventre grogner. Elle ne put s’empêcher de sourire. De son côté, elle avait passé la soirée à grignoter au fur et à mesure le club sandwich au poulet qu’elle avait acheté à la boulangerie avant de venir travailler. Mais gourmande, manger en plein milieu de la nuit ne lui posait pas de problèmes. « Tu crois qu’ils livrent encore à cette heure-ci ? » Ellie leva les yeux vers la grosse horloge qui surplombait le bar. « On ne le saura qu’en appelant … » Aiden sortit son téléphone portable de la poche arrière de son jean. « T’as envie de quoi ? Pizza ? Sushis ? Burgers ? Les trois ? » « Euh … Je … » Elle n’eut pas le temps de dire qu’elle avait dans son portefeuille la carte d’un restaurant de sushi qu’elle avait testé en livraison l’autre jour. Des tranches de thon qui fondaient en bouche. Des makis épicés comme il fallait. Elle en salivait presque en y repensant. Aiden semblait pour sa part plutôt avoir envie de pizza puisqu’il en commanda … cinq ! Ils auraient peut-être besoin de ce car de touristes pour tout finir. Sa gourmandise ne la poussera qu’à prendre deux ou trois parts. Ou il devait avoir une sacrée faim. Au pire, il ramènera le reste chez lui. Ses colocataires seront surement surprises de leur petit-déjeuner salé mais apprécieront peut-être l’attention. Les verres rangés, il ne lui resterait plus qu’à passer un coup d’éponge sur tous les plans de travail juste avant de partir. Elle savait qu’Aiden s’occuperait de la caisse. Elle prit place sur l’un des tabourets, retira au passage ses bottines à talons qu’elle laissa sur le sol, laissant apparaitre ses chaussettes roses à pois blancs. Mauvaise idée, elle n’était pas sûre d’avoir encore la motivation de les remettre plus tard. « Je n’ai plus assez d’énergie, j’ai besoin de manger, de dormir 48h et d’un bon massage. » « Je suis sure que Charlie se fera un plaisir de te masser si tu lui demandes gentiment … » Et elle éclata de rire. Il se ferait surement bien charrier s’il demandait une telle faveur à n’importe laquelle de ses colocataires. « J’avoue que je ferai n’importe quoi pour avoir mon lit là maintenant de suite. »

  Aiden & Ellie

  Saturday Night (fever)

 
J’adore travailler au bar, vraiment. Je n’ai jamais été fait pour de grandes études, encore moins de longues études et tout le monde le savait, mes parents les premiers. Pourtant, je n’étais pas très mauvais à l’école, en primaire, j’étais plutôt même bon. Puis arrivé au collège, j’ai commencé un peu à décrocher, préférant m’asseoir derrière pour faire le pitre que devant pour écouter sagement. J’arrivais quand même à m’en sortir, en faisant mes devoirs une fois sur deux quand je ne les oubliais pas la plupart du temps. Puis au lycée, le déclic a commencé à avoir lieu. J’étais plus celui qui faisait rire la galerie que le premier de la classe. Ce rôle me collait trop bien à la peau et le reste s’est rapidement enchaîné. Le proverbe femme qui rit à moitié dans son lit s’est avéré vrai. Je n’étais pas le clown de service, mais j’étais facile à vivre, usant de mon charme pour toutes les faire craquer. Je faisais partie de l’équipe de basket, synonyme de popularité et finalement, côté fille, je n’étais pas le genre de connard à coucher avec une nana pour la jeter ensuite. Contrairement à mes co-équipier, je n’avais pas cette peur de me caser ou cette frayeur de m’attacher à quelqu’un. Si ça devait arriver, ça arrivera. J’ai été accepté à l’University of Greenwich de Londres et je suis tombé amoureux de cette partie de la ville.  Oui amoureux, alors que je ne l’ai jamais été d’aucune fille. Mais rapidement, je me suis rendue compte que ça ne me correspondait pas vraiment ? J’y suis juste allé parce que je ne savais pas ce que je voulais faire de ma vie et finalement, en côtoyant des gens, en devenant le Respo Soirée du campus, je me suis rendu compte que c’est cette ambiance là que j’aimais, que j’étais réellement dans mon élément. Alors j’ai commencé à enchaîner les petits boulots pour me faire un peu d’argent de poche et j’ai tout plaqué. J’ai quitté la fac, Greenwich et je suis revenue chez moi : Drewsburry. Mes parents étaient toujours à Londres et de mon côté, j’ai retrouvé la maison familiale auprès de ma sœur. Sœur jumelle, avec laquelle j’avais toujours tout partagé. Même quand j’habitais à Greenwich, elle était venue me rejoindre, puis est partit juste quelques mois avant moi à Drewsburry mais finalement, elle a eu une proposition d’emploi et a décidé de quitter la ville, me laissant seul.

Voilà où j’en suis aujourd’hui. Gérant d’un bar avec quelques serveuses, dont celle qui est resté avec moi ce soir pour la fermeture et qui m’aide à tout ranger : Ellie. La jeune femme est l’innocence incarnée. Son début fut difficile, très difficile même mais aujourd’hui, elle s’en sort plutôt bien. Si je l’ai décidé de la garder alors que plusieurs plus compétentes rêvaient d’être à sa place, c’est parce qu’Ellie apporte un petit quelque chose que les autres n’ont pas forcément. Voir pas du tout. Elle est .. Spéciale. Différente. Trop mignonne. C’est impossible de lui résister, elle a ce sourire chaleureux qui attire les clients sans même faire exprès, puis son côté maladroit la rend réellement attachante. Elle ne doit même pas s’en rendre compte. Je lui propose de partir, mais elle semble décidée à vouloir rester avec moi jusqu’au bout. Ce qui me fait sourire. Elle s’acharne quand elle veut et j’aime bien ce côté là aussi, c’est une bosseuse. Par contre moi, je suis à bout et j’ai besoin de manger. Je serais prêt à manger tout et n’importe quoi tant mon ventre crie famine. Je décide donc de commander à manger. Après une hésitation entre les burgers, les sushis et les burgers, j’ai opté pour la pizza sans même avoir laisser l’occasion à Ellie de répondre. J’espère qu’elle aime bien ça, parce que j’en ai commandé cinq. « Je n’ai plus assez d’énergie, j’ai besoin de manger, de dormir 48h et d’un bon massage. » Je finis par prononcer désespérément, comme au bout de ma vie. Je finis même par m’asseoir sur une des chaises hautes et lui fait signe de faire de même. Je pourrais dormir ici, ce soir. Je ne sens plus aucun de mes membres, d’où mon envie de massage. Quoi que, je ne dirais pas non à un jacuzzi non plus. « Je suis sure que Charlie se fera un plaisir de te masser si tu lui demandes gentiment … » Je pouffe de rire. « Charlie ? Me masser ? » Je répète alors. J’ai bien du mal à imaginer une de mes colocs me masser. Elles aiment beaucoup trop m’embêter même si parfois, l’envie leur prend de me faire plaisir. Mais pas comme ça. Je les connais et aucune ne le ferait. A part si je m’engage à faire le ménage pour les semaines à venir. Je suis un homme exploité, je vous jure. Et pourtant, ça fait un bien fou de vivre avec ces nanas. Moi qui justement fuyait la solitude, j’ai bien fait de fermer la maison familiale pour m’installer avec elles.  « A la limite, Izzy pourrait peut-être s’y coller si je lui promets quelques consos pour elle et ses copines qu’elle ramène tout le temps. »  Ses copines qui n’arrêtent pas de me draguer, de me lancer des clins d’œil et des sourires charmeurs. Je pouffe de rire. Je devrais peut-être m’intéresser à l’une d’elle, seulement voilà, ramener une nana à la maison quand on vit à plusieurs risques d’être problématique. « Je suis au courant qu’elles veulent t’ajouter à la team pour m’embêter. Attention, parce qu’après, il faudra assumer ma terrible vengeance. » Je ne dois pas avoir l’air très crédible surtout que ma vengeance se résumerait à des blagues qui seront drôles pour moi mais peut-être pas pour elles. Me charrier est l’activité préférée de mes colocataires qui si elles continuent, vont finir par me faire fuir. Elles me poursuivent jusqu’au bar et sollicitent l’aide d’Ellie. Bien sûr que ça me fait rire et du coup, ça me permets de leur faire subir la même chose.  

« J’avoue que je ferai n’importe quoi pour avoir mon lit là maintenant de suite. » Je la comprends tellement, parce que je ressens la même chose. Mon lit et la bouffe, c’est les deux choses les plus importantes pour moi en ce moment. Je ne pourrais pas survivre sans l’un ni l’autre. « On mange un bout et on y va ? Je suis ex-plo-sé. Je n’ai plus la force de faire quoi que ce soit. » J’ajoute alors. Je passe mes mains dans mes cheveux, puis sur mon visage. « J’espère que ton dîner en valait le coup. » C’est vrai qu’à la base, je lui avais laissé une soirée pour qu’elle aille à un rendez-vous romantique avec un jeune homme et c'est la raison pour laquelle elle se retrouve ce soir avec moi à faire la fermeture parce qu’on avait conclu un accord. En réalité, je ne sais même pas pourquoi je lui pose la question, peut-être que c’est trop indiscret et que je me permets des choses que je ne devrais pas. Ellie reste très réservée sur certains points, moi aussi vous me direz. En réalité, on n’a pas l’habitude de s’attarder sur nos vies, nos échanges se résument au boulot et c’est bien dommage. Je trouve ce bout de femme assez curieux et il faut croire que c’est l’occasion ou jamais de faire plus connaissance. Puis, ce n'est pas comme si son dîner ou son déroulement m'intéressaient après tout.

Le livreur arrive assez rapidement au final, posant nos cinq pizzas sur le comptoir et une bouteille de coca que la pizzeria nous offre. Pas mal, ce n’est pas comme si on avait tout un bar à disposition.  Je le paye et il repart aussitôt, nous laissant seuls avec Ellie. « Ça me fait un effet de dingue à chaque fois que je vois de la pizza. » Je lance en blaguant. « Par contre, j’ai un endroit plus confortable pour manger. » J’annonce en attrapant les boites posées les unes sur les autres et la bouteille de coca. « Tu peux prendre deux verre, s’il te plait ? » La jeune femme me suit, on traverse le bar, arrivant à côté de la réserve. Se trouve là une porte assez discrète, je suis pratiquement sûr que très peu ont dû y faire attention. J’y glisse une clef que je ne partage avec personne et la porte s’ouvre sur… un mini salon. C’est une chambre composé d’un canapé-lit, une table basse et une télé. « Parfois, j’ai la flemme de rentrer à la maison ou trop d’alcool dans le sang pour conduire, alors je reste ici. » Mon petit coin secret rien qu’à moi que je refuse de partager, je le fais exceptionnellement ce soir.

  Aiden & Ellie

  Saturday Night (fever)

  Aiden ne semblait pas convaincu qu’une de ses colocataires lui offre un massage gratuitement. Il devait certainement bien les faire tourner en bourrique, elle en était sûre. «  A la limite, Izzy pourrait peut-être s’y coller si je lui promets quelques consos pour elle et ses copines qu’elle ramène tout le temps. » Des consos gratuites ? Il allait certainement devoir lui promettre bien plus pour obtenir des faveurs de sa part …  « Je dois t’avouer un truc … elle a profité de ta grippe de l’autre jour pour passer la soirée ici. Elles étaient quatre … et je leur ai peut-être offert un verre ou deux chacune …  » Elle était un peu penaude, elle ne comptait pas lui avouer tout de suite. Prise dans les rires et la bonne humeur, les verres se remplissaient et se vidaient facilement. Elle-même s’en était servie alors qu’elle n’était pas vraiment censée boire en service. « Je suis au courant qu’elles veulent t’ajouter à la team pour m’embêter. Attention, parce qu’après, il faudra assumer ma terrible vengeance. » « J’aime beaucoup Izzy, elle a ce petit grain de folie qui fait qu’on ne peut que l’apprécier. Après, je ne suis pas sûre d’arriver à suivre son rythme. » Ellie sourit. Encore une fois, les nuits blanches n’étaient pas vraiment son fort. Son côté mamie sans doute. Elle appréciait de sortir, d’aller danser et de boire des verres mais sa soirée idéale était toute autre : bien accompagnée, dans un bon restaurant, ou devant un feu de cheminée, un verre de vin en main et quelques séries sur Netflix, dans les bras d’un homme. Un peu romantique et fleur bleue, oui tout à fait. « On mange un bout et on y va ? Je suis ex-plo-sé. Je n’ai plus la force de faire quoi que ce soit. » Elle était dans un état similaire, complètement HS. Elle se contenta d’acquiescer. « J’espère que ton dîner en valait le coup. » « Mon dîner ? » Elle sursauta presque en entendant sa question. Son dîner ? Ah oui, son fameux dîner. Celui où elle aurait préféré réussir à échanger son horaire avec ses collègues plutôt que de demander au patron lui-même si elle pouvait avoir sa soirée. Elle avait longuement hésité avant d’envoyer ce sms, se demandant si ce repas avec un parfait inconnu valait vraiment la peine qu’Aiden la prenne pour une fille qui voyait plein d’hommes. Et puis, elle s’était dit zut. Elle s’était dit qu’en 2017, elle arrêterait de se prendre la tête, de trop réfléchir et surtout, qu’elle trouverait enfin son prince charmant, où plutôt celui qui tombera réellement amoureux d’elle sans être un parfait salaud. Décembre n’était pas encore terminé mais les résolutions n’arrivaient jamais trop tôt. Même si pour cet homme-là, elle aurait pu parfaitement attendre la nouvelle année. Non qu’elle ait passé une mauvaise soirée, puisqu’elle avait finalement accepté de le revoir, mais elle sentait aussi au fond d’elle que ça ne mènerait à rien de bien concret. Elle le trouvait juste « gentil ». « Oh oui, il s’est bien passé. » Réponse évasive. Elle n’allait pas lui donner de détails supplémentaires. D’un côté, il s’agissait de sa vie privée et surtout, il n’avait sûrement posé cette question que par pure politesse. Néanmoins, elle sentit comme un petit moment de gêne entre eux. Heureusement, ce fut ce même moment que choisi le livreur de pizza pour entrer dans le bar. Il eut l’air bien surpris de ne voir que deux personnes dans la pièce, en comparaison de ses bras bien chargés. Il déposa le tout sur le comptoir, ajouta à l’ensemble une bouteille de coca « cadeau de la maison » et sortit presque trop rapidement. Une fois de plus, elle se demanda comment juste à eux deux, ils allaient pouvoir engloutir autant de nourriture. « Ça me fait un effet de dingue à chaque fois que je vois de la pizza. » Ellie ne put s’empêcher de rire. « T’es bien un homme pour dire ça ! » Même en étant quelqu’un qui appréciait la nourriture et qui ne surveillait pas vraiment son alimentation contrairement à d’autres filles, elle ne pouvait pas vraiment en dire autant. Aiden s’empara des boîtes et cartons et de la bouteille et lui demanda de prendre deux verres. Il dut la voir froncer les sourcils car il ajouta tout de suite. « Par contre, j’ai un endroit plus confortable pour manger. » C’est vrai que manger perchée sur un tabouret de bar, où pour sa part, elle n’arrivait jamais à s’asseoir de façon stable ou confortable, n’était pas l’idéal. Mais elle ne voyait pas trop où il voulait en venir. Mais docile, elle saisit deux grands verres à mojito de derrière le comptoir qu’elle remplit de glaçons et le suivit à travers la pièce jusqu’à la réserve. C’était ça son idée du siècle ? Bizarre … Non, pas la réserve. Il fit glisser une clé dans la serrure de la porte située juste à côté. Cette porte, Ellie s’était déjà demandé où elle pouvait bien conduire, lors de ses premiers jours ici, mais à force de passer devant plusieurs fois par journée, elle l’avait complètement oubliée. Sa curiosité du début allait donc être satisfaite. Le jeune homme la fit entrer dans une petite pièce, sommairement meublée mais d’allure tout à fait confortable. Une banquette clic clac, une table basse et un meuble surmonté d’une télévision. Un minuscule salon à deux pas du bar. « Parfois, j’ai la flemme de rentrer à la maison ou trop d’alcool dans le sang pour conduire, alors je reste ici. » Il posa les pizzas et le coca sur la table et prit place sur le canapé. La blonde le suivit, surprise de sa découverte du jour. Jamais elle n’aurait soupçonné l’existence de cet endroit. Ultra pratique il fallait bien l’avouer. Pour effectivement dormir … « Ou y emmener une ou deux conquêtes ? » Petite taquinerie qu’elle accompagna d’un clin d’œil. Izzy le lui avait déjà dit, Aiden était un homme à femmes. Il aimait séduire. Mais curieusement, Ellie ne s’était jamais vraiment sentie « menacée  » par lui. En partie parce qu’il s’agissait de son patron. Préférant s’installer en face du jeune homme, elle prit un coussin qu’elle posa à même le sol et s’assit dessus. Comme elle le ferait chez elle. Elle ouvrit la bouteille de coca et entreprit de leur en servir deux grands verres. « Et sinon, tu me conseilles de commencer par laquelle ? Parce que je ne vais sûrement pas réussir à goûter à toutes celles que tu as commandées …  »