_ l'heure du renouveau

FT EVERYONE

Il n'avait pas compté les allers et retours qu'il avait enchainés depuis le début de la soirée. Toutes ces personnes qui cherchent à plaire, qui cherche à profiter d'un instant en compagnie des être aimés. Toutes ses femmes et ses hommes qui espèrent croiser le regard d'une personne en particulier et toutes les autres qui sont déjà bien trop fatigués pour réellement apprécier la soirée. Jona avait parcouru la ville dans toutes les directions possibles pour finalement se cacher dans le parking et y rester, reposé et dégouté par sa propre fatigue. La nuit d'avant, il s'était retrouvé embarqué par les billets verts d'un client qui souhaitait aller bien trop loin. Son portefeuille en avait besoin. Mais cela l'avait empêché d'être réellement au top pour ce soir. Son travail n'était pas facile, mais il y avait quelque chose de différent. Lorsqu'il était derrière le volant, qu'il arpentait du regard les ruelles, il savait toujours parfaitement ce qu'il faisait et où il devait aller. La magie des objectifs, était incroyable. Un homme était toujours plus heureux lorsqu'il savait où il se dirigeait. Lorsqu'il savait ce qui l'attendait. Pour le moment, Jona se contentait d'être allongé à l'arrière de son taxi, garé dans un coin, les yeux fixant le plafond avec lassitude. Il pensait pouvoir faire une petite sieste, le temps que les gens s'amusent, le temps de revenir quand tout le monde doit partir. Il n'y arrive pas. Les bras croisés, il respire lentement et cherche à faire le vide dans sa tête trop occupée par les questionnements profonds de son subconscient. Pourquoi n'allait-il pas danser ? Pourquoi sa vie était-elle devenue si différente ? Est-ce que le rôle et la réputation de sa famille lui manquaient ? Devait-il reprendre contact avec sa mère ? Il soupira. C'était un désastre. À ce rythme, il allait se retrouver à rêver éveillé que le monde s'effondre et qu'un requin entre dans son taxi même, trop affamé.

Cette drôle d’image le fit sourire alors qu’il se frotta les yeux. Il ferma de nouveau les yeux, essayant de nouveau d’être en paix avec lui-même quand une voix résonna plus loin. Masculine, la personne interpelle visiblement une autre. Jona se demande s’il ne peut pas simplement rester là, bercer par les conversations nocturnes d’inconnus dans un parking presque aussi douteux que n’importe quel autre endroit.

_ l'heure du renouveau

FT EVERYONE

Petit à petit, les conversations se créent. Les gens se retrouvent, les mots sont lancés. Dans le silence de son taxi, Jona respire en douceur. Il se laisse bercer par ce qu'il perçoit être des paroles de politesse et se fiche pas mal de ce qui va arriver ensuite. Une voix féminine retentie, un léger "bonsoir" disparaît en douceur alors que Jona ouvre de nouveau les yeux. Il aime être là sans être là. Il aime être invisible, quelque part. Ne pas être vu, ne pas être entendu. Cela lui plaît. Cela lui permet de regarder le monde d'une tout autre façon. Jusqu'à ce bruit, cette vibration, se choque.

Automatiquement, la tête de Jona se relève. Son regard perçant voit une silhouette, juste là. Quelqu'un vient de frapper dans sa voiture. La situation est parfaite pour réveiller Jona, pour le sortir de cet univers parallèle dans lequel il se trouve depuis quelques minutes déjà. Alors sans attendre, il sort. Il affronte le froid de l'extérieur hivernal, le son bruyant désormais du parking légèrement peuplé de gens qui n'en ont rien à faire de cette soirée.

« - T’es sérieux ? » Balance-t-il, dans ce calme naturel qui le caractérise tant. Mais l’inconnu semble paniquer pour autre chose. Jona l’observe chercher, pour finalement relever la tête vers lui. Il cherche une cigarette, il la cherche et il la veut, mais il ne la trouve pas. Dans un élan de suicide complet, il en profite pour demander à Jona si par le plus grand des hasards, il n’aurait pas un de ces bijoux magiques dans le fond de sa poche. « - P’t’être bien. » Son regard se tourne vers les autres. Il s’attarde un instant sur eux, comme si Jona analysait et qu’il essayait de recoller les morceaux d’un puzzle géant. « - Pourquoi tu vas pas leur demander, à eux. » Il revient sur le petit inconnu qui avait heurté sa précieuse voiture. Il en avait besoin, c’était comme de l’air pour respirer. À peine abimé, à peine toucher par un autre, et c’était comme si Jona s’écroulait. C’était horrible comme sensation, pathétique aussi. Pathétique de savoir que tout ce qui lui restait, c’était ça. Une voiture. Un tas de ferraille pas actuel, enclin à décéder dans un avenir proche.