Tu attends une réponse une quelconque réponse. Qu’elle soit positive ou négative. Tu veux juste savoir, si oui, ou non, il veut te connaître. S’il veut accepter que tu sois quelqu’un dans sa vie, que tu ne sois pas rien. Parce que s’il dit “ non “, tu sais très bien que tu retourneras à ton train-train quotidien, encore plus morose que d’habitude. Et, ça toi, tu veux pas. Lucas, c’est un peu la folie de ta vie, et pourtant ça ne fait que quelques jours que tu le côtoies, tu connais son prénom depuis seulement quoi? Peut-être dix petites minutes. Mais, tu t’en fou. Tu sais que ça va à la vitesse grand V, mais ça te fait du bien, ça te fait du bien de voir que ta vie n’est pas un long fleuve tranquille, que tu as quelques remoues. Et tu veux que Lucas continue à être ce remou. Encore et encore, et encore. Tu le sens qui va être important dans ta vie. Oui. Tu le sais, même. Même si c’est seulement pour quelques heures, parce que tu n’es pas idiot, l’amour c’est pas un conte de fée, ça ne dure pas toute une vie. Enfin, tu parles d’amour, mais pour l’instant ça en est au point zéro. Au point de l’attirance sexuelle qui est tellement forte que vous pouvez vous deux la sentir s’écraser sur vos épaules. Enfin, peut-être que t’es le seul à ressentir ça. T’as même l’impression qu’on pourrait entendre les battements affolé de ton coeur dans toute la pièce entière, et ça ça fait chier. Parce que si, Lucas peut les entendre, il doit bien s’foutre de ta gueule. C’est ce que tout le monde ferait. Mike, en premier. Il t’aurait balancé un truc du genre “ Bah alors, Stonmson, j’te fais tant d’effet que ça? “ Toi, t’aurais ris nerveusement. Ce p’tit d’ado prépubère te revint en tête. Et, ça te fait trembler. Parce que tu t’interdis de te souvenir de Mike en règle général. Parce que c’est douloureux, Mike. Mike, c’est un peu l’élément perturbateur dans ta vie. Enfin, pas Mike en lui-même mais tout ce qu’il incarne. Toutes les cicatrices imparfaites et grotesques qu’il t’a laissé sur toi. Tout le monde le sait dans ta famille, tout le monde sait qu’il ne faut pas dire ce prénom. Oser même le prononcer est un sacrilège à tes yeux. Parce que c’est comme ça, et pas autrement. Et là, toi t’y penses, alors que t’attends une réponse. Alors, que tu te sens rapticire petit à petit. Alors, que tu sens ton coeur se ralentir. Il ne te donnera pas de réponse, parce que t’es personne. Solal. T’es personne, t’es rien. Un résidu. C’est des secondes qui te paraissent des minutes. Longues, lentes, et empli de torture. Puis, le supplice se termine. Tu sens une couverture chaude se poser sur tes lippes tremblantes et froides. Tu sais une main venir torturer tes cheveux. Tu sens un torse se coller au tien, tu sens chaque parti des abdominaux cachés de Lucas, tu sens sa langue douce et avide de la tienne, et toi, tu perds le fil. Tu sais plus où t’en es encore une fois. Ta main elle vient se poser sur une hanche, et elle rapproche un corps étrangé encore et encore. Tu veux le sentir plus prêt, tu veux le sentir mieux. Tes lippes se mouvent contre celle du garagiste. Et tu suffoques. Encore et encore. Tu n’arrives plus vraiment à respirer, mais tu veux pas que ça s’arrête. C’est pas toi qui brisera ce baiser. Non. Merci bon dieu, Lucas est beaucoup plus intelligent et le fait à ta place. « Je veux te connaître, tout comme j'ai très envie de te retirer tes vêtements dès maintenant, mais j'peux pas, parce que j'veux pas que tu partes, j'veux pas que tu t'en ailles, et j'veux pas te faire peur. J'veux te connaître Solal, parce qu'avec moi, t'es pas rien, t'es un homme, un putain de bon homme. » Et là, t’as ton petit coeur qui fait des bons, encore et encore. T’as ce p’tit sourire gêné qui vient se loger sur tes lèvres et tu hoches la tête d’un air résigné. Il ne fait pas seulement te dire qu’il veut te connaître, non. Il te dit qu’il veut t’enlever tes vêtements. Il a envie de toi, comme t’as envie de lui. Tu n’es apparemment pas le seul à te faire des films osés mais pas trop. Il faut l’avouer, tu te demandes comment tu fais pour plaire, Solal, à un mec pareil. Tu n’as aucune confiance, en toi. Et c’est peut-être un sketch, peut-être que Lucas, c’est un acteur et toi t’es le dindon de la farce. Mais non, t’y crois en ces mots-là. Ouais, il a l’air sincère, et ça te brise presque le coeur quelqu’un d’aussi sincère, il étale comme ça ses sentiments, alors que toi t’es beaucoup plus pudique. Tu veux pas. Tu sais pas faire ça. Et une nouvelle fois, tu lâches un petit rire. Un seul. Un qui brise le silence d’après ses paroles, y a tes doigts qui vont aggrippés les petits cheveux de ta nuque. Et enfin, tu t’autorises à parler. “ Pour les vêtements, on attendra plus tard… Pas que je ne veuille pas… Mais, j’veux pas que tu penses que je sois venu ici dans le seul but de coucher avec toi, tu vois lle genre? Je suis pas comme ça… Et je veux pas que tu penses ça de moi. Tu me fais pas peur, et je m’en irai pas. Du moins, pas définitivement, d’accord? Et, j’veux te connaître. D’ailleurs… ” T’attrapes un vieux papier dans ta poche et là tu t’actives à sortir le stylo que tu as toujours sur toi. Réflexe de médecin, ou d’une vie un peu trop rangé? Tu ne saurais dire. Puis tu gribouilles sur cette feuille. “ Chez moi. Y a mon adresse dessus. Demain soir. On pourra sortir si tu veux, ou même tu pourras goûter le peu de spécialité que j’sais faire. C’est à dire des pâtes… Des pâtes bolognaises à la sauce barbecue. Vestige d’une vie de célibataire. Voilà. Voilà. ”
roller coaster