L’idée de rentrer plus tôt n’était franchement pas désagréable. Mais, malheureusement, ce n’était pas souvent le cas. Mon boulot prenait de la place, et on devait faire avec. Mais, l’amertume me gagne d’apprendre des choses qui te concerne par le biais de celui-ci. Je ne suis pas un exemple, puisque moi-même je cache quelque chose qui ronge mes entrailles de l’intérieur, mais j’ai l’impression de glisser, que tu me glisses entre les doigts. Le sentiment de culpabilité n’en est que plus fort alors que je me rends compte que je n’étais pas très à l’écoute de ta personne. J’ignorais probablement la chose la plus tragique que tu vivais en ce moment, me conférant un puissant sentiment d’impuissance. Je ne pouvais même pas être en colère contre toi puisque je comprenais pourquoi tu le faisais. Mais je ne pouvais pas non plus accepter sans rechigner cette vérité cinglante : que tu m’as délibérément évincé de cette vérité, même si au départ c’était un peu pour me protéger. « Et bien ce risque est arrivé, pourtant. » Mon ton n’a rien de cassant, c’est juste une constatation. Cette distance qui s’est instauré entre nous y est probablement pour beaucoup. Je soupire, finalement tu avances des arguments de taille, dont je ne peux qu’acquiescer l’exactitude. « Je sais. » Je ne vois pas quoi dire d’autre. Je n’ai pas envie de parlementer sur nos sujets qui tournent un peu trop à la dispute. Ce n’est vraiment pas le bon moment. Je devais être là pour toi, et mettre de côté nos fréquentes tensions pour être présent. Ce n’était pas difficile, mais le fait d’avoir parfois beaucoup à gérer ne rendait pas les choses faciles. Je resserre mes bras autour de toi, il est désormais hors de question que tu t’échappes de mes bras, je voulais que tu sortes ce que tu avais profondément enfoui en toi, mon épaule serait là pour te soutenir. J’ai néanmoins le cœur qui se serre à l’idée que ta mère ne s’envole pour d’autres horizons, mais je tente de résister à l’appel de la douleur déchirante qui menace mon cœur. Je déglutis difficilement quand tu avoues la responsabilité que vous devez porter. Ce n’est pas un choix pour vous. Je n’ose même pas imaginer le dilemme dans lequel tu es plongé. Je pose une main sur ta joue, essuyant cette larme traîtresse qui coule. « C’est à toi de voir ce qui te semble le mieux. » Je ne pense pas qu’il y ait de bonne décision à prendre. Mais ce n’est pas à la légère que tu peux la prendre. Je glisse mes lèvres contre les tiennes pour un baiser léger, en signe de réconfort.

La dispute menace encore de s'imposer entre nous. Je la sens vibrer autour de nous, nous entourer peu à peu pour assombrir notre zone de confort. J'aimerais l'éviter, m'écarter de ce sentiment de morosité qui envahit mon cœur. Je ne désire pas affronter une querelle supplémentaire, malgré les erreurs que j'ai commises. Tu sembles le comprendre même si tu me jettes quelques remarques abruptes au départ. Tu exploses ta colère et je le conçois. Tu as tous les droits de te délivrer de tes frustrations, d'évoquer ce qui te froisse. Je t'ai plongé dans un mensonge, je t'ai éloigné de la vérité sans ménagement. Alors l'avoir découverte par un cruel hasard te met en rogne. Pourtant tu écartes cette hargne de toi pour m'accorder ta douceur. Tu réalises qu'il m'est nécessaire de me blottir contre toi, de recevoir ta tendresse pour que mon cœur se laisse consumer par un certain apaisement. Tu déverses en moi l'affection dont je manque en ce moment ; tu me rassures à ta manière, à travers tes paroles et gestes réconfortants. Tu me témoignes ton amour en me soutenant dans cette épreuve affligeante pour moi, au lieu de te tourner vers la hargne. Je m'apaise au creux de tes bras, je sens une chaleur au creux de mon ventre. Ça décoince quelque chose en moi, entre nous aussi, maintenant que tu connais cette vérité déchirante. Je peux me reposer sur toi, et éclater toute ma souffrance sans craindre qu'elle ne transparaisse trop. Je peux compter sur toi, tout simplement. Le baiser que tu m'offres renforce ce fait et je viens les savourer davantage en me collant encore plus contre toi. « Oui je vais y réfléchir. Tu veux bien rester un peu, dis ? Se poser devant la télé. » Je te vois hocher la télé positivement, en signe de ton acceptation. Ça me soulage de savoir que tu resteras près de moi. Et tu t'appliques à demeurer ce soutien imparable en entourant mon épaule de ton bras musclé, lorsqu'on s'allonge un instant sur le fauteuil. Je pose ma tête dans ton cou pour respirer ton odeur et trouver du réconfort, tandis que mon cœur retrouve un rythme plus ordinaire. Tu parviens toujours à me calmer, rien que par ta présence. C'est sans doute ça, la force de notre amour.