Je ne sais pas ce que je fous là, devant son habitation, à être bouffé par l’hésitation de cogner mon poing contre la porte. J’ignore ce qui m’incite à commettre un geste de désespoir, et profiter de l’occasion que le gamin me tend depuis plusieurs semaines. Certainement que l’infidélité de Matthias avec son meilleur ami me donne une bonne raison d’éliminer tout remord de mon esprit. J’aurais été incapable de faire preuve de déloyauté envers lui, incapable non plus de me laisser toucher par un inconnu. Pourtant, depuis la rupture, brutale et déchirante, je me sens perdu. Envahi par la souffrance et la solitude, je cherche du réconfort autour de moi et ce gamin, Achille, semble être une des seules sources de plaisir placée dans mon existence. Alors je lui ai proposé par message de se rencontrer, de lui accorder cette soirée cupide imaginée qui vraisemblablement, à en croire ses mots, le ferait bander. Je peine à y croire, tout comme je suis persuadé qu’il me jettera le lendemain matin sans aucun scrupule. Un gamin de son âge consomme, savoure le temps d’une nuit et passe à autre chose lorsque l’excitation l’a finalement consumé. Je ne lui en voudrais même pas de m’étouffer de désir pour me repousser ensuite. C’est la loi du désir : il te domine avant de s’envoler et se reporter sur quelqu’un d’autre.

Je décide quand même de le prévenir de mon arrivée et il ne tarde pas à m’ouvrir, laissant apparaître la bouille angélique souvent aperçue sur mon portable. Quand je l’aperçois, mon désespoir se mélange à l’avidité, parce que sa beauté est révélatrice de son âme : un peu enfantine, avec ce côté viril qui s’incruste. « Hey. » Je lâche avec cette pointe de nervosité dans la voix, avançant dans son appartement sans réussir à en déclarer davantage. Je ne sais pas quoi lui dire, à ce gamin, à part que j’ai envie d’oublier ma rancœur dans la luxure. Mais il doit le deviner, il n’est pas trop con, je ne suis pas venu ici par hasard. Je me tourne vers lui certainement parce qu’il semble aussi paumé que moi. Écorché par la vie, en quête de ce sentiment d’extase qui lui échappe sans cesse des mains.